Les années passant, au début des années 2 000, mon indignation s’est nourrie de rares et précieux écrits dont ceux de l’artiste et chercheure brésilienne Paola Secchin Braga en qui j’ai trouvé une première véritable alliée, ses paroles ayant à la fois l’effet d’un baume calmant et d’une dose d’adrénaline ! À la même époque, je « criais » présente à l’invitation du Regroupement québécois de la danse (RQD) à participer à différentes initiatives ayant comme objectif la reconnaissance du répétiteur et de la répétitrice. En quelque sorte, je me suis fait la voix de ce métier à la fois silencieux et invisible. Dans la foulée des travaux précédents les Seconds États généraux de la danse (2008), j’ai présidé le chantier Conditions et exigences de l’art durant lequel, notamment, les répétiteur·rices ont été entendu·es. De cette consultation a découlé la création de la charte et du profil de compétences des directrices et des directeurs des répétitions en danse. Des actions concrètes ont été posées, une brèche s’est ouverte ; sans grand bruit, le métier est sorti de l’ombre. Presque révolu le temps où on affublait le.la spécialiste de l’accompagnement du titre de répétiteur/répétitrice que plusieurs des artistes qui y sont associé·es trouvent réducteur au regard de leurs compétences et responsabilités.
Une dizaine d’années plus tard, la volonté d’historiser la présence des artistes de l’accompagnement m’a reconduite sur les bancs de l’école au doctorat en Études et pratiques des Arts. Une fois de plus, dans l’examen des écrits sur la danse québécoise, je me suis butée à la quasi inexistence de mentions sous divers titres (répétiteur·rice, directeur.·rice des répétitions, assistant·e-chorégraphe, conseiller·ère artistique, regard extérieur…) de cette tierce personne, souvent partie prenante des créations chorégraphiques du répertoire moderne et contemporain. Conséquemment, j’ai remonté un à un les chemins de traverse, scruté les alentours et procédé au repérage des empreintes laissées par l’artiste dans le paysage de la danse québécoise depuis les années 70. À cette étape, l’éclairage fourni par l’histoire et la sociologie a permis le défrichement d’un terrain de recherche immense. Décrypter les archives m’a tenue en haleine ; entre enthousiasme et décontenance, j’ai vu apparaitre la silhouette de nombreux artistes : la majorité des femmes, la quasi-totalité d’entre elles absente des histoires relatées. C’est avec ce plein d’informations que j’ai renoncé non pas à poursuivre ma recherche, mais à la rédaction de la thèse.