Dialoguer (cinquième tableau)

Katya Montaignac

Marche Mozongi (en lokéto 9)

Le tambour ralentit et marque le début du thème 1. Assis au sol, le groupe frappe le sol des pieds puis des mains. Cette séquence est reprise à l’unisson trois fois, avant un redressement direct des genoux à la station debout, dans une posture penchée en avant. À la fois, les pieds piétinent et se déplacent, le buste toujours incliné vers l’avant. Quand le groupe avance, on ignore qui dirige.

C’est ce que j’appelle la « double marche ». C’est une marche ancestrale multidimensionnelle qui nous rappelle que nous sommes des êtres marcheurs réceptifs à toutes les directions. Quand vous avancez votre pied droit, il faut capter l’intelligence du gauche qui travaille. Il n’y a que dans le sens littéral qu’on pense que la droite, c’est la droite. En réalité, c’est faux ! En fait, quand on avance le pied droit, c’est le gauche qui travaille ! Le pied que je soulève, c’est un pied qui marche. Il le fait d’avance. D’où sa rapidité.

La complexité de ce pas vient de ce qu’on est en inversion tout le temps. Chaque fois que je reviens, je fais un échange entre le centre 1 et le centre 2. Je passe de haut en bas sans arrêt. Quand je frappe des pieds sur le sol, je suis en haut ! Il faut connaître le poids de la marche. On marche par habitude. Or, la marche a un poids ! C’est un passage constant de bas en haut. tun kata kutun kataka ! tun kata kutun kataka ! Quand vous allez en bas, ça vous permet de libérer les bras. Les yeux s’intériorisent dans les pieds. Tun kata ! Isolez votre pied. C’est lui qui porte l’alignement du corps. Essayez de séparer le Tun de chaque pied afin d’identifier ce qui se passe entre les deux. Le souffle va se disposer pour que vous arriviez à temps pour l’autre pied.

Les épaules constituent un appui et les mains maintiennent l’ancrage. Il faut se placer en lokéto 9 pour que les bras tombent naturellement sans empêtrer le coude. Tout est en chute. À mi-chemin entre l’épaule et la main, pour que ça puisse être relié au dos. Encore là, inversion : le dépôt du dos est crucial. Le dos te donne le poids nécessaire pour porter le reste. Les hanches portent le bas. L’assise est très importante. La posture est dynamique. C’est le bas qui agit. Les coudes sont dans une mobilité. Le corps est en inversion : à l’intérieur, c’est un échange circulaire total qui le traverse. Le corps est séparé et il passe son temps à tenter de se réunir.

Il faut vous rappeler la structure dont on ne voit ni le début ni la fin. tun kata kutun kataka ! Il ne faut pas s’arrêter de chanter : tun kata kutun kataka ! tun kata kutun kataka !… Je reste dans une régularité, mais je ne suis pas obligé·e de la suivre. Le Kata se déplace. Il faut connaître la structure interne du rythme. Tu y reviens, comme si tu n’en étais jamais parti·e. N’ayez pas peur de chanter. Habituez-vous à être indépendant ·es. Quand on chante un rythme, on devient responsable.

 

Luis Cabanzo, Karla Étienne, Mithra Rabel, Raphaëlle Perreault, Jennifer Morse.
Photo : Kevin Calixte, 2014

 

Boîte chorégraphique Mozongi

Table des matières